[Retour d'expérience] Consultation: projet de territoire des Hauts Tolosans
Retours d’expérience : Consultation sur le projet de territoire des Hauts Tolosans, par Clément Girard, consultant en participation citoyenne chez D21.
La Journée de la civic tech et de l’engagement citoyen, organisée par Décider Ensemble au CESE le 18 mars 2019, en lien avec la conférence internationale TICTeC 2019, a été l’occasion pour les acteurs français de la civic tech et de la participation citoyenne de se retrouver pour collectivement dresser un état des lieux du contexte français. Alors que le Grand Débat National touchait à sa fin, c’était le moment de réaliser un premier bilan de cette expérimentation et de ses déclinaisons dans les territoires. Les 14 temps de la journée ont été consacrés à des thématiques aussi variées que les expérimentations démocratiques au CESE, la civic tech en France et dans le monde, l’inclusion de nouveaux publics et l’éducation au numérique, les formes de l’engagement citoyen, l’accessibilité des plateformes numériques, la civic tech et la transition écologique et solidaire, ou encore les projets numériques citoyens.
D21 est une civic tech internationale qui développe des outils numériques et une activité de conseil en participation citoyenne. Clément Girard, consultant en participation citoyenne au sein de l’entreprise, revient sur l’organisation d’une consultation sur le projet de territoire des Hauts Tolosans.
Quel était le contexte et l’objectif de la consultation sur le projet de territoire ?
Cette communauté de communes réunit 29 communes en zone semi-rurale et périurbaine de Toulouse et compte 32 591 habitants. La collectivité, créée après la loi NOTRe de 2015, souhaitait enrichir son projet de territoire. Elle avait associé différentes entités du territoire qui étaient habituées à ce type de projet, comme les associations ou la chambre de commerce, au moment de la phase d’idéation pour le Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT). La collectivité souhaitait cependant élargir la contribution à ce projet, ainsi qu’améliorer la lisibilité et la légitimité de son action et de ses compétences en se faisant connaître auprès des citoyens. L’idée centrale était de « faire territoire » dans l’esprit des habitants.
Or les élus faisaient face à un certain nombre de défis : ils avaient des difficultés à définir comment, concrètement, ils allaient mettre en place cette consultation. Par ailleurs, ils souhaitaient éviter que la consultation ne soit exploitée par les opposants politiques dans l’optique de préparer les élections municipales de 2020. La mise en œuvre d’un outil numérique créait donc une certaine peur, et a demandé de la conviction. Finalement, il a été décidé de coupler un dispositif numérique léger, mais ouvert et transparent, à des ateliers de travail en présentiel.
La méthode de vote proposée par D21 est une méthode alternative : comment fonctionne-t-elle ?
La consultation s’est faite sur la base d’un questionnaire à choix multiples, en ligne ou en format papier. Elle a fait l’objet d’une campagne de communication pour inciter les habitants à participer. Le questionnaire inclut des questions fermées, des questions sur les caractéristiques socio-démographiques des habitants et quelques questions ouvertes en fin de questionnaire. Pour D21, il est important de croiser les données sur ce que les habitants pensent et leur définition du territoire avec les données sur qui ils sont. Cela permet de mieux comprendre les préférences exprimées, et de s’assurer de la représentativité des réponses et des participants.
Le questionnaire concernait des projets et plans d’actions concrets, afin savoir ce qui était prioritaire pour la population, mais comportait aussi des questions plus larges, par exemple sur la perception du territoire par les habitants. Pour D21, il était important de partir des valeurs et opinions générales des habitants pour voir si elles concordaient avec le travail réalisé par les élus sur le projet de territoire.
La particularité de la méthodologie de D21 est qu’elle repose sur une méthode de votes alternatifs. Chaque question est associée à un certain nombre d’items de réponses. Le participant peut décerner à chaque item une voix positive ou une voix négative. Cependant, il ne peut décerner un vote négatif qu’à chaque fois qu’il a décerné deux votes positifs. Ceci permet d’éviter les votes de rejet systématique. Ce système a été mis en place pour la première fois pour le budget participatif de New York, et présente l’avantage de tracer les lignes de consensus, d’identifier les propositions qui sont rejetées, mais aussi celles qui ne rencontrent que de l’indifférence.
Est-ce que les parties ont été satisfaites de la consultation ?
D21 et la Communauté de Communes des Hauts Tolosans ont exprimé leur satisfaction. 1436 personnes ont participé à cette consultation durant les 47 jours où elle s’est déroulée. Trois quarts des répondants ont utilisé un questionnaire numérique. Les 1436 personnes représentent 4,4% de la population (à titre de comparaison, en moyenne, 4% des habitants d’un territoire s’impliquent dans les budgets participatifs).
L’avantage de disposer de données sociodémographiques est qu’au fur et à mesure de la consultation, on peut savoir quels types de profils ne sont pas représentés, et donc de « corriger le tir » pour assurer la représentation des différents groupes. Les données sont cependant exploitées de manière anonyme pour respecter les participants. Ces données permettent aussi de produire des profils-types d’individus et de définir les besoins particuliers de chacune des catégories. Par exemple, il est apparu que pour un certain nombre d’individus, vivant dans les zones plus rurales à l’ouest de la communauté, une attention particulière est portée à l’environnement naturel.
Les réponses aux questions ouvertes ont été traitées avec des méthodes d’analyse sémantique. Elles ont fait apparaître la prédominance des questions environnementales. Si les élus locaux savaient que ces questions étaient importantes, ils ont malgré tout été surpris de leur prégnance pour le projet de territoire.
La collectivité s’est déclarée très satisfaite de ce qui ressort des réponses aux questions ouvertes. Même dans les contributions les plus critiques à l’égard de la collectivité, les participants apprécient la démarche de consultation et sont demandeurs de ce type d’exercices de participation. Le sentiment était partagé par les élus, qui ont montré la volonté de reproduire des dispositifs semblables. On peut donc parler d’une « acculturation » de ces élus des milieux ruraux, peu accoutumés à l’exercice, qui sont devenus « ambassadeurs » autant de la démarche que de cette façon de voter un peu particulière.
Site D21 sur la consultation : https://fr.d21.me/reference/communaute-de-communes-des-hauts-tolosans
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